mercredi 26 janvier 2011

Le plongeur et le coelacanthe

Aujourd’hui, je viens de voir quelque chose d’extraordinaire qui vient confirmer que nous vivons sur une planète merveilleuse, et que le progrès et l’Homme ne sont pas toujours aussi noirs que certains voudraient nous le dire.


Je vous avais parlé dans un précédent post de l’histoire du coelacanthe (Le coelacanthe : le dernier taxon Lazare ?), ce poisson préhistorique inchangé depuis 60 millions d’années dont le premier specimen fut découvert au milieu du siècle dernier dans les filets d’un chalutier en Afrique du Sud. Depuis ma tendre enfance, je suis fasciné par cet animal, dont on peut admirer un exemplaire (naturalisé) au Museum d’Histoire Naturelle mais j’avais toujours regretté de ne jamais en voir de vivants. En effet, cet animal vit à plus de 100 mètres de profondeur et ne peut pas vivre à la pression atmosphérique.


Ces dernières années, à cause de la multiplication des chaluts en eaux profondes, le nombre de prises accidentelles de coelacanthes a explosé, mais à chaque fois les « vieux quadrupèdes » étaient morts. Il y a quelques années, j’avais quand même été en partie satisfait car des sous-marins de poche avaient réussi à filmer des coelacanthes dans leurs cavernes dans un tombant des Comores mais les images étaient de mauvaise qualité et les coelacanthes assez statiques. Deux équipes, celle d’Hans Fricke en Allemagne (vous pouvez voir les images qu’il a tournées sur mon précédent post sur les coelacanthes) et de Masamitsu Iwata au Japon, qui a récemment filmé le premier bébé coelacanthe (31.5cm). Ce Japonais a également l’ambition de capturer un coelacanthe vivant et de le ramener dans un zoom marin japonais, ce qui en ferait une attraction unique au monde. Sachant qu’un simple dauphin de delphinarium se monnaye à 300 000 $, on peut imaginer qu’une telle créature se vendrait des millions de dollars. Si la technologie le permettait, un marché noir menacerait cette espèce protégée (comme cela est raconté dans le thriller H20 ou bien à la page 78 de mon roman Siècle bleu). Mais ce n’est pas le sujet de ce post. Laissons la place au rêve.


L'an dernier, une prouesse extraordinaire a été réalisée dans l’observation des coelacanthes : des hommes ont réussi à plonger et à nager avec eux ! Beaucoup de gens affirment qu’il s’agit de la plus importante découverte en plongée sous-marine. Cette prouesse est le fruit de la rencontre entre Nicolas Hulot et Laurent Ballesta, l’un des meilleurs photographes sous-marins au monde. Ballesta a plongé pendant au Mozambique avec du matériel hors du commun. En un mois et demi, il a enchaîné 18 plongées à 120 mètres de profondeur (plongées à hauts risques nécessitant jusqu’à 5 heures de paliers de décompression) mais il a réussi à rencontrer le vieux poisson. Le film a été diffusé le 29 décembre 2010 dans l’émission Ushuaïa Nature, je vous laisse admirer les images.


Vous pouvez aussi lire le beau récit de l’aventure de Laurent Ballesta dans Paris Match du 15 juillet dernier.


Certains diront qu’il n’aurait pas fallu aller déranger le vieux poisson, mais je crois que Ballesta et ses compères sont parmi les gens les plus respectueux de la faune et de la flore qu’ils rencontrent. Je crois aussi que ces images serviront à faire comprendre à tous la majesté de cet animal qu’il faut protéger à tout prix des chaluts profonds et surtout du projet de port de commerce dont la Tanzanie souhaite se doter, exactement à l’endroit où se trouve la réserve de coelacanthes. Le seul risque serait que l'exploit de Ballesta attire de nombreux autres plongeurs, mais cela nécessite une telle pratique de la plongée, que le vieux poisson aura encore de paisibles journées devant lui.


Vive les coelacanthes, vive l’Homme et vive le progrès quand il est utilisé ainsi !


dimanche 9 janvier 2011

Edgard Morin : le probable et l'improbable

J'aime Edgard Morin. Depuis longtemps. Dans l'édition du 8 janvier du Monde, Edgard Morin pose un regard sans concession mais, comme d'habitude, éclairant sur l'état de notre société et son avenir. J'aime cet optimisme réaliste et inspiré, que je m'efforce aussi, à mon humble niveau, de rechercher. Il m'a toujours beaucoup inspiré et ce n'est pas par hasard que la plupart des idées avancées ici sont au coeur du projet Siècle bleu, et particulièrement du tome 2 en préparation. Deux phrases sont particulièrement importantes dans le texte ci-dessous :
  • La course a commencé entre le désespérant probable et l'improbable porteur d'espoir. Ils sont du reste inséparables : "Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve" (Friedrich Hölderlin), et l'espérance se nourrit de ce qui conduit à la désespérance.
  • "Le probable n'est pas certain et souvent c'est l'inattendu qui advient".

Edgar Morin : "Les nuits sont enceintes"

LEMONDE 08.01.11 | 13h51 • Mis à jour le 09.01.11 | 17h21

En 2010, la planète a continué sa course folle propulsée par le moteur aux trois visages mondialisation-occidentalisation-développement qu'alimentent science, technique, profit sans contrôle ni régulation.

L'unification techno-économique du globe se poursuit, sous l'égide d'un capitalisme financier effréné, mais elle continue à susciter en réaction des "refermetures" ethniques, nationales, religieuses, qui entraînent dislocations et conflits. Libertés et tolérances régressent, fanatismes et manichéismes progressent. La pauvreté se convertit non seulement en aisance de classe moyenne pour une partie des populations du globe, mais surtout en immenses misères reléguées en énormes bidonvilles.

L'occidentalisation du monde s'est accompagnée du déclin désormais visible de l'Occident. Trois énormes nations ont monté en puissance ; en 2010, la plus ancienne, la plus peuplée, la plus économiquement croissante, la plus exportatrice intimide les Etats d'Occident, d'Orient, du Sud au point de susciter leur crainte d'assister à la remise d'un prix Nobel à un dissident chinois emprisonné.

En 2010 également, pour une première fois, trois pays du Sud se sont concertés à l'encontre de toute influence occidentale : Turquie, Brésil et Iran ont créé ce sans précédent. La course à la croissance inhibée en Occident par la crise économique se poursuit en accéléré en Asie et au Brésil.

La mondialisation, loin de revigorer un humanisme planétaire, favorise au contraire le cosmopolitisme abstrait du business et les retours aux particularismes clos et aux nationalismes abstraits dans le sens où ils s'abstraient du destin collectif de l'humanité.

Le développement n'est pas seulement une formule standard d'occidentalisation qui ignore les singularités, solidarités, savoirs et arts de vivre des civilisations traditionnelles, mais son déchaînement techno-économique provoque une dégradation de la biosphère qui menace en retour l'humanité.

L'Occident en crise s'exporte comme solution, laquelle apporte, à terme, sa propre crise. Malheureusement, la crise du développement, la crise de la mondialisation, la crise de l'occidentalisation sont invisibles aux politiques. Ceux-ci ont mis la politique à la remorque des économistes, et continuent à voir dans la croissance la solution à tous les problèmes sociaux. La plupart des Etats obéissent aux injonctions du Fonds monétaire international (FMI), qui a d'abord partout prôné la rigueur au détriment des populations ; quelques-uns s'essaient aux incertitudes de la relance

Mais partout le pouvoir de décision est celui des marchés, c'est-à-dire de la spéculation, c'est-à-dire du capitalisme financier. Presque partout les banques, dont les spéculations ont contribué à la crise, sont sauvées et conservées. Le marché a pris la forme et la force aveugle du destin auquel on ne peut qu'obéir. La carence de la pensée partout enseignée, qui sépare et compartimente les savoirs sans pouvoir les réunir pour affronter les problèmes globaux et fondamentaux, se fait sentir plus qu'ailleurs en politique. D'où un aveuglement généralisé d'autant plus que l'on croit pouvoir disposer des avantages d'une "société de la connaissance".

Le test décisif de l'état de régression de la planète en 2010 est l'échec de la personne la plus consciente de la complexité planétaire, la plus consciente de tous les périls que court l'humanité : Barack Obama. Sa première et modeste initiative pour amorcer une issue au problème israélo-palestinien, la demande du gel de la colonisation en Cisjordanie, s'est vu rejeter par le gouvernement Nétanyahou. La pression aux Etats-Unis des forces conservatrices, des évangélistes et d'une partie de la communauté juiver paralyse tout moyen de pression sur Israël, ne serait-ce que la suspension de l'aide technique et économique. La dégradation de la situation en Afghanistan l'empêche de trouver une solution pacifique au conflit, alors qu'il est patent qu'il n'y a pas de solution militaire. L'Irak s'est effectivement démocratisé, mais en même temps s'est à demi décomposé et subit l'effet de forces centrifuges. Obama résiste encore aux énormes pressions conjuguées d'Israël et des chefs d'Etat arabes du Moyen-Orient pour intervenir militairement en Iran. Mais la situation est devenue désespérée pour le peuple palestinien.

Tandis qu'Etats-Unis et Russie établissent en 2010 un accord pour la réduction des armes nucléaires, le souhait de dénucléarisation généralisée, unique voie de salut planétaire, perd toute consistance dans l'arrogance nucléaire de la Corée du Nord et l'élaboration probable de l'arme nucléaire en Iran. Si tout continue l'arme nucléaire sera miniaturisée, généralisée et privatisée.

Tout favorise les montées aux extrêmes y compris en Europe. L'Europe n'est pas seulement inachevée, mais ce qui semblait irréversible, comme la monnaie unique, est menacé. L'Europe, dont on pouvait espérer une renaissance de créativité, se montre stérile, passive, poussive, incapable de la moindre initiative pour le conflit israélo-palestinien comme pour le salut de la planète. Pire : des partis xénophobes et racistes qui prônent la désintégration de l'Union européenne sont en activité. Ils demeurent minoritaires, comme le fut pendant dix ans le parti nazi en Allemagne que nul dans le pays le plus cultivé d'Europe, dans le pays à la plus forte social-démocratie et au plus fort Parti communiste, n'avait imaginé qu'il puisse accéder légalement au pouvoir.

La marche vers les désastres va s'accentuer dans la décennie qui vient. A l'aveuglement de l'homo sapiens, dont la rationalité manque de complexité, se joint l'aveuglement de l'homo demens possédé par ses fureurs et ses haines.

La mort de la pieuvre totalitaire a été suivie par le formidable déchaînement de celle du fanatisme religieux et celle du capitalisme financier. Partout, les forces de dislocation et de décomposition progressent. Toutefois, les décompositions sont nécessaires aux nouvelles compositions, et un peu partout celles-ci surgissent à la base des sociétés. Partout, les forces de résistance, de régénération, d'invention, de création se multiplient, mais dispersées, sans liaison, sans organisation, sans centres, sans tête. Par contre, ce qui est administrativement organisé, hiérarchisé, centralisé est sclérosé, aveugle, souvent répressif.

L'année 2010 a fait surgir en Internet de nouvelles possibilités de résistance et de régénération. Certes, on avait vu au cours des années précédentes que le rôle d'Internet devenait de plus en plus puissant et diversifié. On avait vu qu'il devenait une force de documentation et d'information sans égale ; on avait vu qu'il amplifiait son rôle privilégié pour toutes les communications, y compris celles effectuées pour les spéculations du capitalisme financier et les communications cryptées intermafieuses ou interterroristes.

C'est en 2010 que s'est accrue sa force de démocratisation culturelle qui permet le téléchargement gratuit des musiques, romans, poésies, ce qui a conduit des Etats, dont le nôtre, à vouloir supprimer la gratuité du téléchargement, pour protéger, non seulement les droits d'auteur, mais aussi les bénéfices commerciaux des exploitants des droits d'auteur.

C'est également en 2010 que s'est manifestée une grande force de résistance informatrice et démocratisante, comme en Chine, et durant la tragique répression qui a accompagné l'élection truquée du président en Iran. Enfin, la déferlante WikiLeaks, force libertaire ou libertarienne capable de briser les secrets d'Etat de la plus grande puissance mondiale, a déclenché une guerre planétaire d'un type nouveau, guerre entre, d'une part, la liberté informationnelle sans entraves et, d'autre part, non seulement les Etats-Unis, dont les secrets ont été violés, mais un grand nombre d'Etats qui ont pourchassé les sites informants, et enfin les banques qui ont bloqué les comptes de WikiLeaks. Dans cette guerre, WikiLeaks a trouvé des alliés multiples chez certains médias de l'écrit ou de l'écran, et chez d'innombrables internautes du monde entier.

Ce qui est remarquable est que les Etats ne se préoccupent nullement de maîtriser ou au moins contrôler "le marché", c'est-à-dire la spéculation et le capitalisme financier, mais par contre s'efforcent de juguler les forces démocratisantes et libertaires qui font la vertu d'Internet. La course a commencé entre le désespérant probable et l'improbable porteur d'espoir. Ils sont du reste inséparables : "Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve" (Friedrich Hölderlin), et l'espérance se nourrit de ce qui conduit à la désespérance.

Il y eut même, en 1940-1941, le salut à partir du désastre ; des têtes de génie sont apparues dans les désastres des nations. Churchill et de Gaulle en 1940, Staline qui, paranoïaque jusqu'aux désastres de l'Armée rouge et de l'arrivée de troupes allemandes aux portes de Moscou, devint en automne 1941 le chef lucide qui nomma Joukov pour la première contre-offensive qui libéra Moscou. C'est avec l'énergie du désespoir que les peuples de Grande-Bretagne et d'Union soviétique trouvèrent l'énergie de l'espoir. Quelles têtes pourraient surgir dans les désastres planétaires pour le salut de l'humanité ? Obama avait tout pour être une de ces têtes, mais répétons-le : les forces régressives aux Etats-Unis et dans le monde furent trop puissantes et brisèrent sa volonté en 2010.

Mais le probable n'est pas certain et souvent c'est l'inattendu qui advient. Nous pouvons appliquer à l'année 2011 le proverbe turc : "Les nuits sont enceintes et nul ne connaît le jour qui naîtra."

lundi 6 décembre 2010

Siècle bleu sélectionné pour le prix du livre numérique de L'Express


Siècle bleu a été sélectionné pour le premier prix du livre numérique lancé par L'Express, Sony et le magazine Lire ! Le thème choisi pour ce premier prix est "Les littératures de l'imaginaire".


Siècle bleu est le seul premier roman. Les 10 autres nominés pour ce prix sont :

1 - Seul à Savoir - Patrick Bauwen (Albin Michel) - Septembre 2010
2 - L'Eternité n'est pas si longue - Fanny Chiarello (L'Olivier)
3 - Lux Tenebrae - Giacometti et Ravenne (Fleuve Noir)- Juin 2010
4 - Cytheriae - Charlotte Bousquet (Mnemos) - Mai 2010
5 - Rosée de feu - Xavier Mauméjean (Bélial)
6 - Mémoires de la jungle -Tristan Garcia (Gallimard)
7 - Siècle Bleu - Jean Pierre Goux (Edition JBz) - Avril 2010
8 - Cleer - Laure et Laurent Kloetzer (Denoël, Lune d'encre)
9 - Les aigles puent - Lutz Bassman (Verdier)
10 - La Ballade de Lila K - Blandine Le Callet (Stock)

La concurrence sera donc rude. Néanmoins pour ce prix, on a l'assurance que le concours ne sera pas biaisé : le jury est composé de 10 internautes neutres, sélectionnés pour leur goût de la lecture et leur envie de faire partager leurs lectures. Chaque semaine, les 10 jurés chroniqueront chacun l'un des 10 ouvrages. Résultat des courses au mois de mars 2011 au Salon du Livre de Paris. Je suis anxieux à l'idée de lire les critiques de Siècle bleu... En tout cas, je suis déjà très honoré d'avoir été sélectionné !
Siècle bleu est disponible en format numérique chez Numilog.fr et Relay.com. Il n'est pas encore disponible sur les autres plateformes.

dimanche 5 décembre 2010

Deux exemplaires de Siècle bleu à gagner sur le Réseau Cétacés



Deux exemplaires dédicacés de Siècle bleu sont à gagner ce mois-ci sur le site du réseau cétacés. Pour cela il vous suffit de découvrir le cétacé mystère du mois de décembre. Merci à Chloé Yzoard de Réseau Cétacés !


C’est une heureuse coïncidence car c’est grâce au Réseau Cétacés que j’ai découvert l’existence des massacres des dauphins à Taiji en 2004 et j’avais été profondément scandalisé. En 2004, j’avais répondu à leur appel et j’étais allé manifester devant l’Ambassade du Japon à Paris en septembre 2004. Afin de faire connaître ce scandale, j’avais aussi décidé à la même époque que ce serait la scène d’ouverture de mon roman Siècle bleu qui était en gestation et qui mettait en scène l’organisation éco-activiste Gaïa (inspirée entre autres de Sea Shepherd). Finalement dans la version finale, la scène du massacre est précédée d’un prologue et se trouve au début de la première partie du livre. Vous pouvez lire la scène de Taiji en intégralité ici ainsi que la scène où le gouvernement japonais réagit aux actes de Gaïa.


Au moment où Siècle bleu est sorti (avril 2010), le massacre était bien plus médiatisé qu’il ne l’était en 2004, grâce notamment à The Cove, le documentaire de Ric O’Barry qui remporta l’Oscar du meilleur documentaire en 2010. Malgré cela, des dizaines de dauphins sont abbatus et sans l’intervention quotidiennes des observateurs des ONGs des milliers de dauphins seraient encore exterminés chaque année. Il y a donc du progrès mais il faut maintenir la pression médiatique et développer une industrie touristique d’observation des cétacés pour compenser les pertes des pêcheurs.


A propos de Réseau Cétacés


Vous pouvez retrouver le réseau cétacés :

Réseau-Cétacés est aujourd’hui l'une des principales sources d'informations mise à la disposition du public concernant les Cétacés. Scientifiques, étudiants, associations, pouvoirs publics, médias, personnalités du monde de la mer et passionnés de toutes sortes font partie de ce réseau.


Sur le site, découvrez l'actualité des Cétacés dans le monde, l'environnement marin, l'éco-tourisme, les publications scientifiques… Mais également les offres d'emplois et de stages, une bibliographie exhaustive, l'agenda des conférences et événements artistiques, les coordonnées de nos homologues français et internationaux…


En plus de sa mission d'information, Réseau-Cétacés s'implique également de manière active dans la protection des Cétacés, et ce par le biais d'un travail en collaboration avec le monde entier destiné à faire rebondir l'information et à mobiliser le public.


En particulier, le Réseau Cétacés est engagé ces derniers temps sur la protection des globicéphales qui font aussi l’objet de massacres sanguinaires aux îles Féroë. Ils ont développé un programme d’adoption / parrainage de dauphins sauvages ((adoption 5 euros/mois – parrainage 30 euros). 25% de l'argent collecté est reversé au « Fonds de soutien au développement du whale-watching aux Iles Féroé » créé par RC. Ce fonds a pour objectif d'assister financièrement les futurs entrepreneurs qui souhaiteront développer des excursions en mer à la rencontre des dauphins le long du littoral féroïen comme cela se fait ailleurs avec succès notamment aux Canaries.


Quelques liens utiles:


mardi 16 novembre 2010

Ma Collection du Petit Prince

La pensée de Saint-Exupéry occupe le sommet de mon panthéon littéraire et philosophique. Le Petit Prince tient d'ailleurs une place centrale dans l’intrigue du premier tome de mon roman Siècle bleu (ainsi que dans celle du second tome en préparation). Le message de ce petit livre est universel et ce n’est pas par hasard qu’il est l’un des livres les plus traduits au monde juste après la Bible et le Coran : les éditions Gallimard avaient recensé en 2005 pas moins de 159 traductions officielles, mais il en existe en fait plus de 200 (cf. liste à la fin de cette page).
Un jour, j’ai rêvé que ce livre pourrait servir de pierre de Rosette et permettre à un historien du futur de décrypter toutes les langues ou servir de base pour un langage universel mettant fin à la malédiction de Babel. Je m'étais aussi dit qu’en rassemblant toutes ces traductions, la puissance du message de ce livre serait démultipliée et pourrait changer le monde. Aussi en 2000, en même temps que je démarrais le projet Siècle bleu, je me suis lancé dans la collection des traductions du Petit Prince. Au cours de mes voyages ou de ceux de mes amis (c’est la règle que je me suis fixée malgré quelques entorses), j’en ai pour l'instant réunies 56. Je suis donc encore loin du compte...
Appel aux amis du Petit Prince du monde entier : si vous disposez d'un exemplaire dans une langue qui me manque (cf liste à la fin de cette page) et que vous souhaitez m'aider à poursuivre cette quête, je vous serai infiniment reconnaissant! Un exemplaire dédicacé du petit prince ou tout ce que vous voudrez ! En tout cas, votre nom figurera bien évidemment sur cette page. Pour me contacter, vous pouvez m'écrire à

lundi 1 novembre 2010

Un système qui ne peut répondre au défi environnemental

Dominique Bourg a donné dans le monde une interview au Monde qui résume parfaitement les défis de ce "Siècle bleu"... A méditer et à prolonger. Je vous conseille également la lecture de son article "L'éco-scepticisme et le refus des limites" paru dans le numéro de juillet-août 2010 de la revue Etudes.


Dominique Bourg : "Un système qui ne peut répondre au défi environnemental"

Le Monde | 30.10.10 | 13h36


Professeur à la faculté des géosciences et de l'environnement de l'université de Lausanne, Dominique Bourg vient de publier, avec Kerry Whiteside, professeur de sciences politiques au Franklin and Marshall College de Pennsylvanie, un essai intitulé Vers une démocratie écologique (Seuil, 106 pages, 11,50 euros). Les deux chercheurs y expliquent pourquoi, à leurs yeux, nos institutions politiques sont inaptes à régler les grands problèmes environnementaux de la planète et doivent être refondées.


"Les dégradations que l'humanité inflige aujourd'hui à la biosphère sont sans précédent", écrivez-vous. Toute l'histoire de l'humanité, de la vie même, n'est-elle pas faite de crises et de bouleversements de la nature ?


La Terre a connu des changements brutaux. Mais la situation actuelle n'a aucun antécédent. D'une part, l'humanité bouscule les mécanismes régulateurs de la biosphère, autrefois hors d'atteinte. De l'autre, elle est confrontée à un problème de ressources qui devient sévère.

Les deux préoccupations majeures sont le changement climatique et l'accélération du rythme de l'érosion de la diversité des espèces. Nous agissons à très grande échelle sur le système climatique, avec 40 % de CO2 dans l'atmosphère de plus qu'au début de l'ère industrielle, et les climatologues nous disent qu'aller au-delà d'un réchauffement de 2° C, ce serait ouvrir une boîte de Pandore, libérant une série de rétroactions qui nous feraient dériver vers des températures difficilement supportables par l'espèce humaine.

S'agissant de la biodiversité, des espèces ont certes disparu chaque fois que les hommes ont investi des territoires nouveaux. C'est ce que le biologiste américain Edward Osborne Wilson appelait les "disparitions coup de marteau". Mais aujourd'hui, il s'agit d'une "disparition holocauste". Nous entrons probablement dans la sixième extinction et celle-ci, extrêmement rapide, nous est totalement imputable.

Dans le même temps, nous nous heurtons aux limites des ressources de la biosphère : ressources énergétiques, minérales, biotiques, et, à l'échelle locale, en eau douce. Un seul exemple : les ressources halieutiques sur lesquelles nous avons opéré une razzia. Nous avons vidé les mers.


Indépendamment de leur ampleur inédite, en quoi ces problèmes environnementaux sont-ils radicalement nouveaux ?


D'abord, ils ne sont plus locaux, mais transfrontaliers et, pour certains, globaux. Le changement climatique, l'acidification des océans, l'érosion de la biodiversité... sont des problèmes planétaires, à l'interface entre l'humanité et la biosphère. C'est une situation totalement originale.

Ensuite, à la différence des pollutions traditionnelles, les grandes menaces actuelles sont invisibles. Ni le changement de la composition chimique de l'atmosphère, ni l'accélération de la perte de biodiversité, ni les micropolluants de l'air ou de l'eau ne sont accessibles à nos sens.

A l'invisibilité s'ajoute l'imprévisibilité. Aucun des grands problèmes écologiques apparus dans la seconde moitié du XXe siècle n'a été anticipé. Découvrir, avec l'effet de serre, que ce qui a assuré notre confort compromet tous les acquis de la saga du progrès et menace notre propre avenir a été une surprise complète.

De plus, la temporalité des atteintes à l'environnement a changé. Il existe un effet d'inertie qui fait que le temps de réponse des écosystèmes aux dégradations qu'on leur inflige est extrêmement long. Et une irréversibilité : une fois qu'on a changé un état de l'atmosphère ou des océans, on n'a aucun moyen de revenir en arrière.

Enfin, les problèmes écologiques ne peuvent plus être réduits aux seules pollutions. Elles n'en représentent qu'une petite composante et, alors qu'on peut y trouver des parades techniques, les deux grandes questions auxquelles nous devons faire face - celle des perturbations de la biosphère et celle des ressources - ne relèvent pas de solutions techniques seules.


Selon vous, les démocraties ne répondent pas à ces exigences et sont donc impuissantes à résoudre les grands problèmes écologiques. Pourquoi ?


Dans son principe même, la démocratie représentative suppose que les élus repassent régulièrement devant leurs électeurs pour rendre compte de leur action. In fine, l'individu est donc le seul juge des politiques publiques et de son bien-être. Or les problèmes environnementaux échappent au jugement individuel spontané. En outre, les élus sont portés à défendre les intérêts d'électeurs particuliers, et non des intérêts globaux.

Autre difficulté : on nous a mis dans la tête depuis soixante ans que l'enrichissement matériel est la clé du bien-être, alors que nous avons aujourd'hui la nécessité de produire et de consommer moins, ce qui ne veut pas dire qu'on sera moins heureux.

Enfin, nos démocraties accordent une prime au court terme : elles ont beaucoup de mal à prendre en compte les intérêts du futur quand ils paraissent en contradiction avec ceux du présent. Pour toutes ces raisons, notre système souffre d'une incapacité politique structurelle à répondre aux défis environnementaux.


Par quel autre système le remplacer ?


Il ne s'agit pas de l'abroger, mais de l'enrichir. L'enjeu est de trouver une articulation entre le citoyen, le savant et le politique. Sur les questions environnementales, la connaissance scientifique doit être au coeur du système décisionnel - sans verser dans une "expertocratie" - et la société civile impliquée. Rien ne doit être décidé sans participation citoyenne.

Nous proposons deux objectifs constitutionnels nouveaux, stipulant que l'Etat, dont la mission est de préserver l'intérêt fondamental de la nation, doit veiller à la sauvegarde du bien commun que constitue l'équilibre de la biosphère, et que la finitude des ressources naturelles impose une gestion concertée, à l'échelle internationale.

Une "académie du futur", composée de chercheurs internationalement reconnus, aurait pour charge d'exercer une veille sur l'état de la planète et d'éclairer les décisions politiques. A ses côtés, un nouveau Sénat, formé pour deux tiers au moins de personnalités qualifiées - proposées, par exemple, par les organisations non gouvernementales environnementales - et pour un tiers de citoyens, aurait pour rôle d'élaborer, en amont de l'Assemblée nationale, les grands mécanismes législatifs, par exemple fiscaux, permettant de répondre aux nouveaux objectifs constitutionnels. Ce Sénat pourrait, avec l'aval de conférences de citoyens, opposer son veto aux propositions de loi contraires à ces objectifs.


Qu'attendez-vous de cet appel à une refondation politique ? Souhaitez-vous peser sur l'élection présidentielle de 2012 ?


Nous mettons des propositions sur la place publique. Elles vont être passées au crible et enrichies par un panel d'experts que nous allons mettre sur pied avec la Fondation Nicolas-Hulot. Si des responsables politiques veulent s'en emparer, tant mieux ! Notre désir est de nourrir le débat public, et la présidentielle de 2012 offre une occasion de le faire.


Propos recueillis par Pierre Le Hir.


vendredi 22 octobre 2010

Tragédie des biens communs dans un monde fini



L’idée que nous vivons dans un monde fini m’obsède. Elle est d’ailleurs la clef de voûte du projet Siècle bleu : ce siècle sera celui du monde fini, face à cela l’humanité a le choix d’apprendre à vivre avec les limites de notre monde avec tout ce que cela implique comme changements (option dite "siècle bleu") ou bien basculer dans le chaos (cf. Genèse de Siècle bleu).


L’humanité tâtonne et n’a pour l’instant pas réussi à trouver un mode de gouvernance et une organisation économique qui permettent de gérer la pénurie à venir des différentes ressources naturelles. Si rien n’est fait, nous serons victimes inéluctablement de ce que l’économiste Garreth Hardin appelait la Tragédie des biens communs (tragedy of commons) dans un article célèbre paru en 1968 dans la revue Science (l’article est disponible intégralement et gratuitement).


Le texte original de Garrett Hardin décrit comment l'accès libre à une ressource limitée pour laquelle la demande est forte mène inévitablement à la surexploitation de cette ressource et finalement à sa disparition. Chaque individu ayant un intérêt personnel à utiliser la ressource commune de façon à maximiser son usage individuel, tout en distribuant entre chaque utilisateur les coûts d'exploitation, est la cause du problème.


L’économie de marché qui domine le monde contemporain accélérera ce processus, car elle n’offre pas de rétroactions permettant de gérer la pénurie, la hausse des prix (rétroaction prévue par le marché) n’intervenant bien souvent que trop tard ou jamais. On le voit par exemple pour l’exploitation des stocks de poisson qui s’écroulent en silence. La morue d'Atlantique n'a pas été secourue par le marché (qui se contente aussi bien de colin ou d'une autre espèce), elle a disparu. On le voit plus généralement dans la biodiversité à laquelle l’économie traditionnelle ne donne pas de prix. Le rapport Sukhdev présenté mercredi au sommet international sur la biodiversité qui se tient à Nagoya (Japon) sous l'égide de l'ONU (qui a déclaré 2010 Année Internationale de la biodiversité), nous a rappelé que les services rendus par la nature étaient chiffrables à 23 500 milliards de dollars, soit la moitié du PIB mondial. A nouveau, je ne suis pas sûr qu'intégrer cela artificiellement dans l'économie de marché, comme cela a été le cas avec le CO2, changera quelquechose. Le problème est l'état d'esprit et Einstein disait bien : "Aucun problème ne peut être résolu, sans changer l'état d'esprit qui l'a engendré".


Si la disparition d’espèces animales ou végétales n’émeut pas outre mesure nos décideurs, la pénurie d’autres ressources provoque en revanche un grand stress. On le voit en ce moment en France avec la grève des dépôts de carburant qui préfigure d'ailleurs l’avenir proche si rien n’est fait pour développer des alternatives aux énergies fossiles (et surtout une réduction massive de la demande énergétique). Mais ces alternatives elles-mêmes vont buter sur la finitude d’autres ressources. Prenons par exemple, les voitures électriques (le mieux évidemment étant de n’avoir pas de voitures) qui requièrent du lanthane pour les accumulateurs ou bien les éoliennes qui nécessitent 600 kilos de néodyme pour leurs aimants.


Le lanthane et le néodyme font malheureusement partie de ce que l’on appelle les « terres rares » (ou « métaux rares ») dont 96% de la production est assurée par la Chine et qui sont utilisées dans toutes les industries de pointe (comme l'aéronautique, la défense ou l'électronique).


Ces mystérieux éléments chimiques font depuis un an les titres des journaux car la Chine s’en sert comme d’une arme diplomatique. L’an dernier elle a réduit de 30% ses exportations de terres rares et elle vient d’annoncer une nouvelle réduction de 40%. Officiellement la Chine souhaite d’abord satisfaire sa demande intérieure en plein essor et réorganiser cette filière (qui comportait 130 acteurs épars et que la Chine veut réduire à 3 ou 4). Officieusement, suite à la collision entre un bateau des gardes-côtes japonais et un navire de pêche chinois au large des îles Senkaku (pour les Japonais, les îles étant appelées Diaoyu côté chinois), revendiquées par les deux pays, elle a fait comprendre au Japon sa dépendance des exportations chinoises. Et depuis récemment, c’est les Etats-Unis qui en font les frais (suite à une plainte déposée auprès de l’OMC pour subventions illicites au secteur des énergies renouvelables). Il n’est pas la peine de préciser que les cours de ces métaux ont explosé.


Pour résoudre la tragédie des communs il y a habituellement plusieurs solutions : la nationalisation de la ressource ou l’intervention des pouvoirs publics pour en réguler la consommation. Le problème est qu’ici on parle de ressources dispersées (inégalement) à travers le globe et la nationalisation par l’ONU n’est pas envisageable, pas plus que la régulation qui nécessiterait encore l’organisation de « grands machins » comme le sommet de Copenhague qui dureront un temps infini et ne serviront qu’à montrer la faible cohésion des humains entre eux. Les ressources finies feront donc l’objet d’armes diplomatiques pour ceux qui les possèdent et éveilleront les convoitises des pires mafias. Il faut bien l’avoir en tête pour préparer la transition. A cela, on ne peut qu’essayer de se ramener au bon sens, très bien résumé par ce poème indien :


Quand le dernier arbre sera abattu, la dernière rivière asséchée, le dernier poisson pêché, l'homme s'apercevra que l'argent n'est pas comestible.