Gilbert Sinoué, à qui l’on doit entre autres Le Livre de
saphir et Des jours et des nuits (qui figurent tous deux parmi mes livres préférés),
vient de signer à nouveau un très beau livre : Les Nuits du
Caire.
C’est l’histoire d’un égyptien exilé en France et âgé de
soixante ans qui décide de retourner en Egypte pour retrouver son amour
d’enfance. Jusque-là rien de bien nouveau, sauf que toute l’histoire se déroule
le 29 janvier 2011, au pic de la révolution. L’homme ressasse ses souvenirs et
voit son pays à feu et à sang. Porté par une écriture somptueuse et un talent
de conteur inégalé, Sinoué nous donne sa version de l’histoire de l’Egypte au
XXIème siècle, très éloignée de que l’on nous sert habituellement. Farouk, Moubarak,
Sadate, Jacques Brel, Les Frères musulmans, le kédhive Ismaïl et l’impératrice Eugénie tous y
passent et on comprend la situation dramatique de ce pays.
Au-delà de cela, c’est une magnifique réflexion, sur le temps
qui passe, le bonheur, le souvenir du bonheur, la vieillesse, les choses qui
changent et celles qui demeurent. Pour en témoigner ce magnifique passage sur
le Nil.
L’Égypte pourrait perdre ses marques, se travestir, se
défigurer au point d’en être méconnaissable, le fleuve, lui, demeurera,
immuable, toujours recommencé. Il berça des dynasties pharaoniques, fut témoin
des amours déchirées de César et Cléopâtre, il a vu passer les Grecs, les
Romains, les Arabes, les Turcs, les Mamelouks, Bonaparte et son armée
désorientée, les British, et il est toujours là. Porteur de tous les secrets de
l’univers. En lui, je me reconnais, je me reconnaîtrai toujours.
Ou cette citation d’André Gide :
La
promesse de la chenille n’engage pas le papillon.
Ou cette phrase sublime :
J’ai mal. Mal à ma terre.
Un très grand (petit) livre.
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